LYON 1ère

CENTRALE DU BUGEY : COLLECTIFS ET ASSOCIATIONS RÉCLAMENT SA FERMETURE

LEO BALLERY

LEO BALLERY

Pro et anti-nucléaire ont manifesté à Lyon le samedi 25 septembre, avec pour sujet commun la centrale du Bugey. Si les premiers militent pour le renouvellement des réacteurs actuels, les seconds, eux, se mobilisent pour un arrêt total de la centrale. Dans un pays comme la France, où le nucléaire est omniprésent, il peut paraître difficile de s’en détacher. Pourtant de nombreux collectifs réclament un véritable plan de sortie du nucléaire.

Depuis l’arrêt de Fessenheim, la centrale du Bugey est la plus vieille encore en activité. La durée de vie d’une centrale nucléaire est un sujet à débat. Si les plus sceptiques considèrent que la limite est de 30 ans, certains estiment que les réacteurs peuvent rester en activité une cinquantaine d’années. De manière générale, la durée de vie d’une centrale est évaluée à 40 ans, une estimation partagée par EDF.

La question de la durée de vie d’une centrale est à nuancer. En effet, cette durée peut théoriquement être augmentée avec le changement de pièces essentielles pour la sûreté. Cependant, Jean-Pierre Collet, membre de l’association “Sortir du nucléaire Bugey“, rappelle que  “dans une centrale, on ne peut pas tout changer. On ne peut pas changer la cuve, qui est soumise à rude épreuve depuis plus de 40 ans. (…) On ne change pas non plus l’enceinte, qui peut présenter des fissures“.

La centrale du Bugey a, quant à elle, dépassé les 40 ans de sûreté.  Pour autant, EDF n’envisage pas sa fermeture. Au contraire, la centrale est pressentie pour la construction de deux réacteurs nouvelle génération nommés EPR.

EPR un projet incertain

Les réacteurs EPR sont une technologie développée par la France en partenariat avec l’Allemagne. Plus puissant que les réacteurs classiques, ils ont une capacité de production de 1 600 mégawatts contre 1 450 mégawatts pour les derniers réacteurs construits en France. De plus, leur durée de vie est évaluée à 60 ans. Pour toutes ces raisons, et pour d’autres, EDF prévoit la construction de 6 réacteurs EPR sur le territoire national. Aux premiers abords, les réacteurs EPR semblent révolutionnaires. Pourtant, c’est un projet régulièrement critiqué et remis en cause.

À Flamanville en Normandie, la construction d’un réacteur EPR a débuté en 2006, avec un budget prévisionnel de 3,3 milliards d’euros. 15 ans après, le réacteur n’est toujours pas en fonctionnement et le coût du projet s’élève à 19,1 milliards d’euros. Un projet considéré par beaucoup, comme une véritable catastrophe industrielle et économique. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, désignait quant à lui le projet “d’échec industriel”.

Ces dérives ne sont pas inhérentes à la France. En Finlande, la centrale nucléaire d’Olkiluoto fait face aux mêmes difficultés. En Grande-Bretagne la centrale de Hinkley Point voit aussi son projet d’EPR se confronter à de nombreuses dérives. Il faut tout de même noter que la ville de Taishan en Chine a deux réacteurs EPR en état de marche.

À la vue de ces difficultés, liées aux réacteurs EPR, de nombreux collectifs se mobilisent en opposition à la construction de réacteurs sur le site du Bugey. “Prolonger cette vieille centrale c’est pour nous très grave.  Mais construire de nouveaux réacteurs n’est pas mieux. (…) On ne sait pas si ces réacteurs pourront fonctionner correctement. “, exprime Jean-Pierre Collet.

Une France sans nucléaire

En 2018, Emmanuel Macron, président de la République, annonçait la fermeture, d’ici 2035, de 14 des 58 réacteurs nucléaires que compte la France. Avec pour priorité les sites les plus anciens, comme celui du Bugey. Également, le gouvernement prévoit une baisse de 50% de la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici 20 ans. En 2019, le nucléaire représentait 70.6% de la production d’électricité française. En 2020, la part des énergies renouvelables s’élève à 19,1 %. En 2009 l’objectif de la France était d’atteindre 23 % d’ici 2020.

Des annonces qui à l’époque n’avaient pas contenté les anti-nucléaires. Aujourd’hui, le sentiment est toujours le même et les attentes persistent. “Il faut programmer la sortie du nucléaire. Évidemment, on ne va pas arrêter toutes les centrales du jour au lendemain. (…) Nous demandons un calendrier de sortie du nucléaire comme celui de l’Allemagne. Il faut une vraie volonté politique d’arrêter les centrales nucléaires au niveau national (…) Parallèlement, il est urgent d’entrer dans une politique de mix-énergétique“, détaille Jean-Pierre Collet.

Pour l’association “Sortir du nucléaire Bugey“, il est essentiel de fermer la centrale le plus rapidement possible. Selon eux, le projet d’EPR n’est pas une solution. “Il est temps de débrancher cette centrale, la plus vieille de France, et hors de question d’y implanter de nouveaux réacteurs“, affirme l’association dans son communiqué. Ils ne sont d’ailleurs pas seuls, d’autres collectifs anti-nucléaire et associations de protection de l’environnement dénonce la volonté d’EDF de conserver la centrale du Bugey. Plus surprenant, le canton de Genève (situé à 80km de la centrale) a porté plainte à deux reprises contre la centrale. Ils estiment qu’elle fait courir « un risque majeur » pour la population suisse.

Pour porter leurs revendications, une manifestation est organisée le dimanche 3 octobre à Saint-Vulbas (Ain). À 14h, le cortège prendra la direction de la centrale pour se positionner au plus près du site.