LYON 1ère

TUNA ALTINEL : « J’AI ENVIE DE CROIRE EN UN MONDE MEILLEUR »

Emmanuel Rivals

Emmanuel Rivals

Incarcéré, puis bloqué en Turquie, Tuna Altinel a enfin récupéré son passeport et a pu rejoindre la France. Invité sur le Grand Direct, ce 14 juin, le mathématicien revient sur son quotidien, tout en apportant un message d’espoir.

Un simple voyage en Turquie, début 2019, qui s’est transformé en deux années de combat. Non, ce n’est pas le synopsis d’un film, mais bien la réalité de Tuna Altinel. Mathématicien d’origine turc, universitaire à Lyon et conférencier, il a été accusé de « propagande pour une organisation terroriste« , suite à la signature d’une pétition pour la paix au Kurdistan. Il est alors incarcéré du 12 mai 2019 au 30 juillet 2019, puis libéré, mais retenu en Turquie car son passeport lui a été retiré. Après plusieurs recours et deux longues années, Tuna Altinel a récupéré son passeport et a pu atterrir à Lyon, vendredi dernier (11 juin).

Malgré tout, Tuna Altinel garde son sourire, et à la question « comment allez-vous ?« , il aime à blaguer. « Je me sens un peu fatigué, j’ai dû dépoussiérer toute ma maison. Il y avait de quoi faire depuis le temps. » Mais plus sérieusement, c’est pour lui « un soulagement malgré les deux dernières années difficiles. » Une difficulté qu’il a surmontée grâce « au soutien de mes proches, ma compagne et toute la mobilisation internationale. Une mobilisation qui m’a permis de faire face aux imprévus, mais surtout de garder le moral. »

Garder l’espoir malgré les conditions

Un état d’esprit qu’il a su garder « malgré les conditions pénitentiaires difficiles en Turquie », notamment grâce aux relations qu’il a développées avec d’autres détenus. « C’est vrai que mon séjour a été plus confortable, parce que j’ai fait des rencontres. En tant que professeur, j’ai rencontré des personnes qui voulaient apprendre de nouvelles langues, j’ai donc enseigné le Français et l’Anglais, en retour, ils m’apprenaient le Kurde. » Une relation prof-élève qui ne restera pas entre les murs de la prison. « On continue d’échanger par correspondance, par voie postale. » Des lettres qui peuvent parfois mettre du temps à arriver, « car les autorités les contrôlent« , mais le mathématicien a les mots justes : « la prison, c’est aussi la patience. »

Attendre. Un maître-mot pour Tuna Altinel. « La première menace qui pèse sur vous en prison, c’est de ne pas savoir quand on va sortir. Parfois, je me disais « visiblement on est là pour un moment… »« . Mais cette menace n’est pas la seule qu’il a connue, et même une fois libre, il lui arrivait de ressentir un danger. « Une fois dehors, on ressent toujours cette menace de se faire arrêter une nouvelle fois. Mais il ne faut pas perdre le moral vis-à-vis de ça. » Une situation délicate, qu’il a laissée derrière lui, pour rejoindre la ville de Lyon. « À mon arrivée, j’ai visité le quartier, je suis allé au marché, à la boulangerie, j’ai retrouvé de producteurs et des marchands que je connaissais. »

Finalement, Tuna Altinel a simplement retrouvé tous ces moments de vie qui riment avec liberté.

Crédit photo : YASIN AKGUL / AFP